BULLETIN INFO PÊCHE 48 : le rapport sur les conditions du moment et les conseils du mois
Poursuite d’un temps frais en cette période estivale
Commençons par le haut Lot, où en termes de niveaux d’eau, le manque commence vraiment à se faire sentir, mais on a vu pire certaines années. Heureusement pour les truites, la température y reste relativement fraîche et les insectes présents. Quelques coups du soir y restent encore possibles en sèche, de même que les journées couvertes qui peuvent comme chaque été se montrer productives.
Plus bas, sur le Lot intermédiaire, les conditions furent un peu meilleures notamment grâce aux apports du Bramont, qui ont toujours en plus la particularité de teinter légèrement les eaux, mais là aussi l’activité est calme et se concentre sur des zones et laps de temps très précis, sur de longs linéaires par exemple, où quelques rares postes abritent des poissons qui s’alimentent encore discrètement.
De l’autre côté du Sauveterre, dans les très touristiques Gorges du Tarn, les chevesnes et vandoises ont été plutôt joueurs au milieu des nombreux canoës et baigneurs … Certains coups du soir y permettent de jolies prises sur ces espèces, plus rarement sur les truites, qui ont parfois presque totalement déserté des parcours pourtant très poissonneux il y a encore quelques années. C’est malheureusement le cas observé récemment sur le parcours « découverte » de la Malène qui s’est bien dégradé au fil des années et où les éclosions de grosses éphémères blanches, « les manes », ont désormais complètement disparu, tout comme les pêches miraculeuses de belles truites zébrées aux points noirs qui régalaient il y a peu les jeunes pêcheurs. Souvenirs d’une époque révolue, sur un secteur aujourd’hui « décoré » d’une belle colonie de cyanobactéries sur 90% des plages de galets.
Plus haut dans le département, la Truyère a été clairement la rivière avec de bons niveaux d’eau de ce mois de juillet 2021. Lors de certaines journées, elle présentait même un débit soutenu et on s’y serait cru au début du printemps. Paradoxalement, sans être médiocre, les résultats de pêche ont été relativement moyens par rapport aux espérances des pêcheurs. Sur la Rimeize et le Bès les conditions sont difficiles, chaudes et séches, malgré la possibilité de toucher quelques poissons en insistant à l’ombre sous les arbres
Sur le Chapeauroux, la partie plateau qui réserve toujours de belles pêches au printemps est désormais impêchable, faute à un niveau d’eau très bas et à la présence de renoncules aquatiques sur l’intégralité du parcours. Seuls quelques petits linéaires se pêchent encore sur la partie la plus en aval, même si les nombreux béals et autres micro-centrales (qui font couler beaucoup d’encre sur la toile en ce moment mais toujours si peu d’eau […]) y retirent l’eau sur une grande partie de la rivière. Du coup, la pression de pêche se reporte sur les quelques rares parcours intéressants et y rend également les parties de pêche aléatoires.
L’Allier est quant à lui très bas sur sa partie amont. C’est un peu mieux du côté de Langogne mais on y retrouve très peu d’activité, ceci étant très certainement dû à la température de l’eau. Il faut donc descendre dans les gorges où les lâchers d’eau de Naussac maintiennent des débits satisfaisants. Toutefois, en général les lâchers d’eau s’intensifient durant les mois d’août et de septembre pour monter entre 8 et 12 m3/s, ce qui rend la pratique de la pêche compliquée et les résultats assez médiocres, en plus de rendre certains accès parfois chaotiques, prudence aux aventuriers donc.
Sur le lac de Naussac l’eau a été mesurée récemment à 24°C, le niveau y est encore bon mais on note une baisse significative avec des lâchers d’eau à 3.5 mètres cube/seconde, qui vont encore augmenter et possiblement changer les conditions de pêche, qui sont plutôt bonnes pour l’instant. Les mises à l’eau y sont encore accessibles (côte 942 mètres et 170 millions de mètres/cube), et même si les brochets se montrent plutôt discrets pour le moment, les sandres y réservent encore de belles sensations.
Sur Charpal, les conditions de pêche restent bonnes également avec une eau de surface mesurée récemment à 23°C. Les coups du soir commencent à sérieusement réveiller les perches et les brochets avec des chasses parfois frénétiques en surface.
Côté Cévenol, les orages récurrents de ce mois de juillet ont sensiblement participé à maintenir des conditions de pêche intéressantes sur l’Altier notamment, avec un débit satisfaisant et une température mesurée à 17°C le 20/07 sur sa partie aval, ce qui reste frais pour la saison.
L’impact s’est également ressenti sur le Lac de Villefort où les eaux de surface ont flirté avec les 20°C durant tout le mois, pour finalement entamer leur réchauffement lors de la dernière semaine, phénomène fortement accompagné par un bloom éclair de cyanobactéries, qui s’est comme d’habitude fait ressentir sur l’activité des poissons.
En effet, en plein dans mes désormais traditionnelles colos pêche de l’été, cela s’est matérialisé par d’excellentes pêches au coup et au feeder la semaine du 12 au 18, avec des bourriches bien remplies par une majorité de poissons blancs, des gros gardons aux ablettes en passant par un festival de brèmes bordelières… Pour ensuite se concentrer sur des pêches de perches communes lors de la semaine du 19 au 25, qui nous ont régalées pendant plusieurs jours avec leurs chasses qui furent quasiment incessantes en journée. J’observe chaque année ce phénomène sur ce lac, lors de l’apparition des cyanobactéries au milieu de l’été, les poissons blancs stoppent net leur alimentation, et les carnassiers profitent un temps de la turbidité naissante sur les premiers mètres de la colonne d’eau pour concentrer tout ce petit monde sur les bordures et profiter d’un festin éphémère. Car oui, cette bénédiction soudaine pour les perches, et même certaines truites un peu téméraires*, n’est que de courte durée et la concentration grandissante en « algues bleues » leur clouera également très vite le bec.
Je tiens également à donner suite personnellement à plusieurs questionnements de pêcheurs entendus ou rencontrés au bord du lac lors de ces deux semaines d’animation : Effectivement les lâchers de truite s’amenuisent sur Villefort, en été en tout cas, pour mon plus grand bonheur puisque cela m’évitera sûrement à l’avenir de devoir en ramasser les cadavres asphyxiés quelques heures après avoir été lâchées dans des eaux qui, disons-le clairement, n’ont aucun intérêt à les accueillir en plein été. Cela m’évitera également de devoir expliquer, comme l’année passée, aux jeunes pêcheurs de 8 à 12 ans qui m’accompagnent au bord de l’eau, pourquoi, je les cite : « il y a des grosses truites qui nagent sur le dos tout autour du lac ?», puis, quelques jours plus tard : « pourquoi ça sent la mort jusqu’à la base nautique ? ». Au passage, ce sera peut-être une excellente occasion pour certains de « repenser leur pêche », de se sensibiliser et de comprendre un tant soit peu le fonctionnement écosystémique du milieu dans lequel ils pratiquent, et, de fait, d’éviter les tas de déchets laissés là par des pêcheurs loin d’être consciencieux (dixit les enfants des colos une fois encore, avec qui nous avons ramassé d’innombrables pelotes de fil, hameçons à ressort et dépôts de pâtes non utilisées les semaines passées). Enfin, la méconnaissance n’est pas une fatalité, et je connais de très bons animateurs nature qui œuvrent toute l’année pour sensibiliser au fragile environnement qui nous entoure qui veut bien prendre le temps de les écouter et de les suivre. À bons entendeurs.
*Je connais un des jeunes de ma deuxième semaine de colo qui se souviendra longtemps d’un combat éclair lors d’une veillée « coup du soir », et qui après une touche sèche au feeder, un ferrage dans le bon timing et les premiers tours de manivelle, se sera écrié : « Thibaut, c’est du lourd », puis vu dérouler quelques mètres de fil au son d’un moulinet pourtant garni de 22 centièmes qui aura sifflé pendant quelques secondes lors d’un rush venu d’un autre monde …
Terminons par un point météo : la première quinzaine d’août devrait être relativement fraîche avec peut-être, espérons-le, quelques pluies … Malgré ces espoirs, cet été les orages semblent se cantonner sur le nord du massif central, laissant souvent la Lozère en marge des perturbations. Nous croisons les doigts pour que cela descende un peu plus dans nos territoires pour assurer la fin de saison.
Pour la Compagnie des Guides de Pêche de Lozère,
Thibaut DUPUY